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le secteur bancaire

Évaluation des risques climatiques et transition à une économie à zéro émission nette

06 juil. 2021 • 7 min

Darren Hannah

Par Darren Hannah

Vice‑président, Finances, Risques et Politique prudentielle
Association des banquiers canadiens

Les banques du Canada suivent des pratiques et des stratégies de gestion des risques prudentes, qu’elles ont perfectionnées au fil des ans. Grâce à un solide leadership, les banques ont brillamment réussi, depuis toujours, à faire face à une myriade de risques, dont les risques liés au crédit, à la liquidité, aux marchés, aux activités et à la technologie. Sources de fierté, les banques canadiennes se sont révélées efficaces dans l’identification, l’évaluation et la prévention des divers risques émergents, tout en contribuant à la croissance économique du pays.

Durant la crise de 2008‑2009 qui a ravagé les systèmes financiers dans le monde, les banques du Canada ont fait preuve de résilience, échappant dans l’ensemble aux bouleversements qui ont fait rage ailleurs. Une grande part de cette réussite est attribuable à la stabilité de notre secteur bancaire et à ses saines pratiques de gestion des risques. Vu leur résilience, les banques canadiennes ont été classées parmi les plus stables dans le monde par le Forum économique mondial.

Un exemple plus récent est la situation que nous vivons actuellement, soit la pandémie au coronavirus. Grâce en partie à son secteur bancaire bien capitalisé, le système financier canadien a fait preuve de résilience face aux troubles soudains amenés par la pandémie. Le surintendant des institutions financières sortant, Jeremy Rudin, l’a bien souligné : « Dès les premières heures de la pandémie, le système [financier canadien] a su faire preuve de toute la résilience – résilience des fonds propres, résilience de la liquidité et résilience opérationnelle – dont nous avions tant besoini ». Durant ces temps difficiles, les banques du Canada soutiennent leurs clients de façon à amortir le choc économique auquel ils sont exposés et elles sont prêtes à contribuer à une relance solide et durable.

Comme toute organisation tournée vers l’avenir, les banques modifient constamment leur cadre de gestion afin de tenir compte des nouveaux types de risques qui se pointent et, plus particulièrement maintenant, des risques liés aux changements climatiques. Comme elles l’ont déjà fait, les banques resteront centrées sur la résilience de leurs propres activités et sur le bon fonctionnement d’un système financier capable de faire face aux risques, présents et futurs, découlant des changements climatiques.

Contrer et atténuer les risques climatiques

Au Canada, plusieurs banques avaient déjà lancé des programmes et adopté des stratégies pour limiter l’empreinte carbone de leurs propres activités au moyen d’actions concrètes visant la réduction des émissions à effet de serre. Les banques font de réelles contributions en réduisant leurs émissions de CO2 et sont généralement considérées comme des entreprises à faibles émissions de carbone.

Les banques du Canada, et de nombreuses autres banques dans le monde, ont franchi une autre étape en empruntant le chemin de l’évaluation des risques que comportent les « émissions financées », soit les émissions financées à travers les prêts, les investissements et les autres services financiers contractés par les clients commerciaux. Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), l’organisme de réglementation prudentielle au Canada, travaille avec les banques, les caisses de retraite et les autres institutions sous réglementation fédérale à l’évaluation des risques qui les guettent durant la mutation vers une économie durable à faibles émissions de carbone. Les banques sont déterminées à collaborer avec les organismes de réglementation canadiens et internationaux en vue de contribuer à la protection du système financier canadien contre les chocs climatiques, en commençant par la collecte de données de base fiables sur les risques climatiques.

Pour contrer et atténuer les risques liés au climat, il est essentiel, en premier lieu, de bien comprendre l’effet de la transition graduelle vers une économie faible en émissions de carbone. Des données additionnelles sont nécessaires en vue de mesurer correctement les risques climatiques et de les gérer en conséquence. Les participants au système financier ont besoin de meilleurs renseignements pour évaluer adéquatement les risques physiques et les risques découlant de la transition, et pouvoir ainsi assurer un passage tranquille à une économie à zéro émission nette d’ici 2050. Afin que cette initiative se concrétise, les banques doivent obtenir de meilleures données sur les risques climatiques auxquels sont exposés leurs clients, ce qui leur permettra d’établir une meilleure tarification et une gestion plus efficace des risques.

Grâce à une communication améliorée de l’information, un plus grand volume de données sur les risques liés au climat sera mis à la disposition des banques et des investisseurs, qui en tiendront compte dans leur processus décisionnel. Or, pour servir à une prise de décision éclairée, ces renseignements doivent être cohérents et comparables. Les données sur les risques et les opportunités liées au climat permettront aux prêteurs et aux investisseurs de mieux tarifer les risques et les gérer, de consacrer le capital nécessaire à l’atteinte des résultats financiers désirés et de placer le Canada sur le bon chemin d’une croissance économique durable.

Alignement sur l’information financière relative aux changements climatiques du GIFCC

De grands efforts internationaux sont en cours pour développer et mettre en œuvre les cadres évolutifs de communication de l’information financière afin de pouvoir évaluer systématiquement les risques liés aux changements climatiques. Le secteur bancaire canadien est en faveur de la communication de l’information liée aux risques climatiques et appuie les efforts visant l’établissement de lignes directrices harmonisées dans ce sens. Ainsi, la comparabilité entre organisations sera faisable et la possible fragmentation dans ce domaine à l’échelle mondiale sera réduite.

On se dirige de plus en plus vers un alignement sur le cadre de comparabilité entre institutions financières, conçu par le Groupe de travail sur l'information financière relative aux changements climatiques (GIFCC). Le GIFCC a été établi en 2015 par le Conseil de stabilité financière. Considéré de nos jours comme la norme de référence en la matière, le cadre du GIFCC est utilisé par de nombreux investisseurs et organisations dans le monde, ce qui contribue à renforcer sa position de langue véhiculaire pour la communication de l’information sur les risques financiers associés aux changements climatiques. Chaque grande banque canadienne travaille déjà à la mise en œuvre des communications développées par le GIFCC. La conception du cadre prévoit sa mise en œuvre progressive : la première étape est centrée sur la divulgation qualitative, et seront ensuite introduites graduellement les mesures quantitatives.

L’information est utile seulement lorsque toutes les parties en saisissent le contenu. Voilà pourquoi l’alignement sur le GIFCC représente un grand pas en avantL’alignement sur une norme mondialement reconnue est important; la voie future à suivre sera clairement tracée et des directives et des données cohérentes seront constamment fournies aux diverses parties. L’information est utile seulement lorsque toutes les parties en saisissent le contenu. Voilà pourquoi l’alignement sur le GIFCC représente un grand pas en avant.

Le mois dernier, les ministres des Finances du G7 ont appuyé le modèle des risques relatifs aux changements climatiques conçu par le GIFCC. Ils ont affirmé soutenir l’adoption obligatoire de la divulgation relative aux changements climatiques, qui fournit aux participants du marché des renseignements cohérents et utiles pour la prise de décisions et qui est fondée sur le cadre du GIFCC, conformément aux cadres réglementaires nationaux. Dans cette même réunion, les ministres des Finances du G7 ont aussi appuyé le travail de la Fondation des normes internationales d’information financière qui travaillera au développement d’une norme mondiale de communication durable en se basant sur le cadre du GIFCC. Les pays du G20 ont également fait part de leur soutien à ces efforts.

On gère ce qu’on mesure

La divulgation des risques relatifs aux changements climatiques comporte deux dimensions : une physique et une transitionnelle. La valeur des actifs ou des passifs financiers peut être affectée par les éléments suivants :

  • les effets économiques, avérés et potentiels, des changements climatiques persistants (physique)
  • le passage à une économie à faibles émissions de carbone (transitionnel)

Dans un contexte d’octroi de prêts, la divulgation permettra aux institutions financières d’évaluer plus efficacement le volume des risques découlant des facteurs climatiques. Parallèlement, les investisseurs pourront mieux évaluer les stratégies et les portefeuilles des banques et des autres institutions financières en vue d’une meilleure gestion de leur exposition aux risques climatiques. Ainsi, le cadre du GIFCC est utile pour les prêteurs, mais aussi pour les investisseurs qui auront un clair aperçu de la façon dont les entreprises dans lesquelles ils investissent, y compris les institutions financières, gèrent les nouveaux risques amenés par les changements climatiques. Cela pourra être pris en compte pour voir comment le marché met à prix les actions de ces entreprises.

Pour une économie durable

Les banques canadiennes savent que des engagements concrets sont nécessaires afin de réaliser le plus rapidement possible une croissance économique propre et pour atteindre l'objectif ambitieux d'une économie à zéro émission nette d'ici 2050, conformément à l'Accord de Paris sur les changements climatiques. Les risques physiques immédiats attribuables à l'augmentation des émissions de CO2 et la transition vers une économie à faibles émissions de carbone menacent la stabilité financière et économique du Canada. Il est possible de réduire une partie de ces risques en s’engageant dans une transition ordonnée plutôt que désordonnée, une transition qui tient également compte des composantes uniques de l'économie canadienne.

En effet, la communication des données sur les risques climatiques, au moyen d’un cadre largement adopté, donnera une meilleure idée des difficultés auxquelles nous sommes confrontés et du meilleur moyen de s’y attaquer, ensemble. En fin de compte, d’importants travaux sont entrepris au sein du système financier canadien afin de veiller à ce que ce système demeure une source de force pour l'économie durant la transition graduelle vers la décarbonisation.

i osfi-bsif.gc.ca/fra/osfi-bsif/med/sp-ds/Pages/jr20201123.aspx