Les changements climatiques constituent l’enjeu actuel le plus pressant. Stimulées par l’objectif commun d’aider leurs clients à réussir et les collectivités à prospérer, les banques au Canada ont adopté les mesures nécessaires pour contrer les risques climatiques ainsi que pour aider à construire un avenir axé sur la durabilité et à raffermir la position de notre pays face à ce défi intergénérationnel.
Les institutions financières partout dans le monde ont toujours considéré les efforts investis dans les changements climatiques sous l’angle de la responsabilité sociale des entreprises. Toutefois, ce point de vue est en train de changer en raison d’une reconnaissance accrue des conséquences financières immédiates et des risques futurs possibles que représentent les changements climatiques. Pour cette raison, les banques du Canada incluent désormais les facteurs climatiques dans leur cadre de gestion des risques financiers.
Vu la dimension financière qu’ils comportent, les changements climatiques sont considérés comme un type émergent de risques. Ainsi, les banques modifient leur vision de la gestion des risques afin d’y inclure de nouvelles dimensions et adoptent les mesures nécessaires pour les contrer. En cristallisant leurs efforts sur l’incorporation des facteurs climatiques et sur la durabilité, les banques contribuent à soutenir la transition graduelle du Canada vers une économie à faibles émissions de carbone.
Établir une mesure de référence pour les changements climatiques
Le surintendant des institutions financières, M. Peter Routledge, a récemment noté que le risque climatique est « un défi auquel il faut s’attaquer sans tarder ». Le secteur bancaire est conscient de l’urgence d’agir en vue de contrer les risques climatiques et de marquer des progrès à ce chapitre au cours de cette décennie.
Comme je l’ai relevé dans un précédent article de Survols, il est essentiel, en premier lieu, d’accroître nos connaissances collectives de ce défi grâce à des données additionnelles sur les risques climatiques. Les participants au système financier ont besoin de meilleurs renseignements pour évaluer adéquatement le prix qu’il en coûterait ainsi que les risques physiques et les risques découlant de la transition, et pouvoir ainsi assurer un passage tranquille à une économie à zéro émission nette d’ici 2050.
Le secteur bancaire canadien respecte les communications financières relatives au climat à travers un ensemble de lignes directrices harmonisées visant les déclarations sur les changements climatiques qui réduisent le potentiel d’une fragmentation mondiale. Chaque grande banque canadienne est déjà en voie de mettre en pratique les communications élaborées par le Groupe de travail sur l’information financière relativement aux changements climatiques (GIFCC). Considérées comme une norme mondiale, les recommandations de ce groupe de travail tracent le chemin à suivre pour mesurer les risques climatiques, soutiennent la comparabilité entre institutions financières et offrent aux divers intervenants une orientation et des informations cohérentes.
L’information est utile seulement lorsque toutes les parties en saisissent le contenu. Voilà pourquoi l’alignement sur le GIFCC représente un grand pas en avant. En effet, la communication des données sur les risques climatiques, au moyen d’un cadre largement adopté, donnera une meilleure idée des difficultés auxquelles nous sommes confrontés et de la meilleure stratégie pour s’y attaquer, ensemble.
Capacités de gestion des risques évolutifs
Les banques du Canada sont des institutions prudentes, tournées vers l’avenir, qui évitent les possibilités de vastes écarts sur les marchés financiers et dans l’économie. Au quotidien, les banques évaluent soigneusement les risques avant d’accorder des prêts et afin de maintenir leur résilience. Dans la même optique, les banques commencent à renforcer leur capacité de mesure et de gestion des risques physiques et transitionnels que posent les changements climatiques à l’égard de leurs activités et de leurs portefeuilles de prêts.
Les banques ne sont qu'aux premiers stades de l’inclusion de facteurs climatiques, dont l'analyse de scénarios, à leurs capacités d'évaluation des risques. Mais elles peuvent s'appuyer sur plusieurs décennies d'antécédents positifs. La gestion des risques climatiques est une nouvelle fonction qui se développera au fil des ans. Nous sommes heureux de pouvoir continuer à travailler avec le BSIF sur ce front et attendons, au cours de l'année, le lancement d'une ronde de consultations au sujet d'une ligne directrice sur la gestion des risques climatiques.
Le secteur bancaire n'apporte qu'une partie de la solution. Nous soutenons donc – et même encourageons – toutes les entreprises canadiennes à prendre des mesures favorables à l'environnement afin d'orienter leurs propres stratégies, modèles d'affaires et prises de décision, et d'aider ainsi notre pays à passer à une économie plus verte au fil du temps.
Réserves suffisantes de fonds propres
Les banques canadiennes disposent déjà de réserves adéquates pour atténuer les imprévus dans leurs bilans. Le cadre de capital du BSIF est conçu de façon à tenir compte des risques financiers propres au climat dans le cadre de l'approche globale de gestion des risques liés au crédit, au marché et à l'exploitation. Du point de vue des banques, les changements climatiques ne sont pas un risque financier autonome, mais plutôt un facteur en expansion qui façonne et affecte les risques qu'elles gèrent déjà.
De nombreuses banques maintiennent une réserve opérationnelle en capital bien supérieure aux exigences minimales du BSIF, soit 10,5 %. Dans l'ensemble, les banques du Canada ont fixé leur ratio de fonds propres de catégorie 1 à 14,88 % en moyenne pour se protéger de toute une myriade d'événements susceptibles d'affecter leur bilan. Grâce en partie à un secteur bancaire bien capitalisé et fortement axé sur la gestion des risques, le système financier canadien a fait preuve de résilience face à plusieurs chocs externes, notamment la grande récession de 2008‑2009 et la pandémie au coronavirus.
Si le BSIF devait introduire une marge de capital supplémentaire spécifiquement pour les risques climatiques, une harmonisation internationale serait cruciale. Il est certain que le Canada souffrirait d'une hausse des exigences de fonds propres si les organismes de réglementation des autres pays n'emboîtaient pas le pas. Le maintien de politiques avantageuses, ainsi que de structures financières et fiscales concurrentielles, est essentiel pour la prospérité du Canada et pour le mieux‑être financier de ses citoyens.
Un continuum d’efforts
Les changements climatiques nécessiteront une réponse complexe qui s’étendra sur plusieurs années, et notre travail dans ce sens a déjà commencé. Or, les facteurs climatiques ont un horizon de risque opérationnel à plus long terme, ce qui amènera les banques à suivre un processus itératif pour gérer ce type de risques émergents.
La gestion des risques climatiques est donc évolutive. Il y a à peine trois mois, les banques, les assureurs et les gestionnaires d'actifs se sont associés aux efforts mondiaux visant la comptabilisation des émissions financées et l'intégration des aspects environnementaux aux investissements et aux prêts. Ces efforts mondiaux se sont intensifiés avec la conférence de Glasgow sur les changements climatiques (COP26), qui a eu lieu en Écosse, en novembre 2021. Et des travaux concertés sont toujours en cours pour articuler une stratégie canadienne claire sur la façon dont nous allons accomplir la transition vers une économie à zéro émission nette d'ici 2050.
Ce qui est déjà clair, toutefois, c'est la détermination des banques canadiennes à lutter contre les changements climatiques et à adapter leurs capacités de gestion des risques pour pouvoir traiter les risques climatiques comme des risques financiers. Il s'agit d'un changement de perspective radical qui mettra le secteur bancaire sur une nouvelle voie audacieuse, vers un avenir plus viable.